Nous avons assisté à une conférence de Marie-Pierre Lahalle, chargé d’exposition à la Cité des sciences, au Citem 2004 et avons rencontré Didier Coiffard qui fait partie de l’équipe Web.
Budget de fonctionnement d’environ 100 millions d’euros, 2,6 millions de visiteurs par an, un millier de salariés, 30 000 m², 7 expositions temporaires par an.
Mme Marie-Pierre Lahalle explique comment la Cité utilise le numérique dans les expositions.
Le but de la Cité est de faire comprendre la science et les technologies par une approche ludique et active ; l’interactivité et les technologies de l’information ont un rôle central.
Au début années 80 : le multimédia comme outil pédagogique.
L’ordinateur est alors rare et fascinant. Il est perçu comme un outil pédagogique permettant d’apprendre en jouant. Dans les années 80, il n’y a aucune mise en scène autour de l’ordinateur qui est une attraction en soit. L’usage qui en est fait est individuel.
L’utilisation pédagogique du multimédia sera particulièrement soulignée en 99 dans l’exposition désir d’apprendre.
Milieu années 90 : Le multimédia comme expérience sensible.
Les ordinateurs se généralisent. Internet entre dans les entreprises : il faut faire évoluer sa muséologie.
Grâce au développement technologique, ils ont recours aux images de synthèses, aux capteurs ainsi qu’aux vidéoprojecteurs. Il s’agit d’ouvrir le multimédia vers la convivialité, l’immersion, et l’expérience sensible.
Les mots clés de la conception deviennent : mise en scène, émotion, spectaculaire, interaction collective, immersion. La visite d’une exposition devait être une expérience mémorable à travers le sensible.
Une exposition clef de cette période est l’exposition « nouvelles images, nouveaux réseaux ». La salle de navigation est conçue par Maurice Benayoun, elle utilise comme interface un cube en 3D. Il est intégré à l’espace scénographique. Le parcours est mémorisé avec le ticket du visiteur. Ce qui lui permet de se déplacer et reprendre sa consultation là où il en était. A la fin il pouvait imprimer sa propre bibliographie. C’était un dispositif précurseur de « visite + ».
A partir de là, ils ont recherché des interfaces sensibles pour impliquer le visiteur. Exemple, en 1999 une exposition sur les sons, avec des percussions virtuelles (développé avec le GMEM de Marseille) où les gestes sans contact du visiteur déclenchent des sons.
Ou dans l’expo permanente Images (2001) : l’utilisation d’images infrarouges permettant au visiteur de voir son propre corps en IR.
Ils s’ouvrent aux arts numériques : Installation A Volve de Sommerer et Mignoneau. Exposition « l’homme transformé ». « Elle » de Catherine Ikam (expo images) / personnage virtuel réagissant à la présence du visiteur. Installation « paysages 1 » de Luc Courchesne. Espace art numérique de Ninr. « J’efface votre trace » de Du Zhen Jun présenté à la manifestation Villette Numérique 2002.
Aujourd’hui : le multimédia comme scénographie
La mise en scène mise sur une immersion totale. L’exposition est multimédia.
Par exemple lors de l’exposition Climax. Ils ont voulu frapper les esprits dans cette exposition centrée sur les risques climatiques. Ils ont retenu une agence hollandaise Vinmas Mvrdv qui a proposé un dispositif immersif pour l’ensemble de l’exposition. Les images façonnent l’ensemble de l’exposition. Et finalement il n’y a que ça.
Les salles ne sont pas thématiques, mais organisées selon un mode de communication avec le visiteur. 1ère salle : le film avec 8 écrans synchronisés sur un mode narratif. 23 minutes de films à 360°. Différents scénarios du futur. 2ème salle : le simulateur. Par l’interactivité. C’est un simulateur de climat. Le même jeu proposé 8 fois, et projeté. Comme dans une salle de guerre. 3ème salle : approfondissement par des interviews d’experts.
Au final le public indique apprécier le film, mais pas la simulation, à cause de sa complexité.
Le multimédia objet de fascination
Les visiteurs adorent le multimédia. Les éléments d’exposition utilisant le multimédia sont les plus visités. Il reste aujourd’hui encore une forte fascination pour l’écran, pour l’interactivité. Y compris pour le multimédia traditionnel. (c’est à dire ceux avec 1 écran, 1 souris pour 1 visiteur). Cela marche d’autant mieux qu’il y a un côté narcissique.
La complexité est une constante des critiques : les utilisateurs supportent mal de ne pas arriver à manipuler, de s’en sentir exclu. Le contenu lui-même proposé est peu critiqué. C’est l’outil lui-même qui est jugé, qui est objet d’attention de la part du visiteur.
Visite +
Le projet Visite Plus consiste à proposer en ligne un rappel de la visite et de la documentation complémentaire au visiteur. Celui-ci doit s’identifier sur le site de la cité pour accéder à son compte personnel. La première version s’appuyait sur des codes barres sur le ticket du visiteur, qui devait badger les informations l’intéressant. Le succès de ce système était alors assez mitigé car les visiteurs ne comprenaient pas bien ce que cela pouvait leur apporter. Une nouvelle version utilisant des assistants personnels a été utilisée pour l’expo Canada et a connu un bon succès. (A propos de cette exposition, le partie pris étant de montrer un Canada moderne, toute l’exposition reposait sur ces assistants personnels qui contenaient toutes les notices et commentaires de l’exposition. Tout était piloté à partir de ce PDA.) En 2 ans, plus de 100 000 comptes personnels ont été créés. L’application Visite+ a été développée à partir de logiciels libres et la Cité envisage de le proposer à d’autres institutions culturelles.
Organisation des équipes techniques à la cité des sciences :
Un service informatique de 40 à 50 personnes. Il gère l’intranet et le système d’information. Deux personnes à plein temps assurent la maintenance des sites web (sans s’occuper de leurs contenus). Le service est sollicité par les expositions pour avis technique. Mais la maintenance des matériels dans les expositions est assurée par le service des expositions.
Une direction de la production multimédia : elle regroupe la direction informatique et multimédia (10 à 12 personnes), et service audiovisuel (5 personnes audiovisuel, production et suivi de production). Ils interviennent comme fournisseurs pour les expositions, avec des échanges de budgets entre services. Ils font du suivi de projet, de la réalisation de projet (en sous-traitant une grande partie), de la veille technologique et ils proposent des idées aux expositions. Ce sont des communicants, programmeurs, « bidouilleurs »...
Une équipe web de 7 personnes, rattachée à la médiathèque. Elle anime le site web et pilote le développement des nouveaux sites.
Filmer une conférence pour une diffusion live ou différée est fait par le service des conférences lui-même. Il n’y a pas de technicien d’astreinte en dehors des heures d’ouverture (cela ne pose de problèmes qu’occasionnellement pour les serveurs).
Le site Web de la cité :
Chaque exposition a son site, qui reste toujours en ligne même après la fin de l’exposition. C’est ainsi qu’un site d’une exposition ancienne sur le Titanic reste aujourd’hui le plus visité. Le site web reçoit 5,5 millions de visites par an dont 40% venant de France, avec une moyenne de 8 pages vues par visiteur. Le site représente environ 40 000 pages et sera bientôt premier site web culturel de France en terme de visite (devrait dépasser Le Louvre en 2005). Tous les gros projets de web sont faits en externe et pilotés par cette équipe. Un site d’exposition coûte dans les 15 000 euros et est fait par un prestataire indépendant de celui de l’exposition. A titre indicatif, la Cité dépense chaque année 550 000 euros pour son site, hors salaires. L’objectif du site web n’est pas seulement de faire venir le public à une exposition mais de contribuer à la notoriété de la Cité. Les sites web sont en général en français et en anglais.
L’hébergement du site web est fait en interne (après avoir été externalisé durant une période). Ils achètent à Akamaï un service de diffusion (système de réplication de contenu sur Internet permettant d’éviter l’engorgement des serveurs de la cité). Pour chaque site, ils achètent à un prestataire le référencement du site (avec éventuellement modification de pages pour qu’elles soient plus visibles dans les moteurs de recherche).
La cité n’achète aucun droit pour les médias mis en ligne des images : soit c’est prévu par les expositions, soit ils les négocient gratuitement.
Ils utilisent pour ces sites un outil de gestion de contenu mais cela semble une contrainte forte pour les prestataires qui préféreraient ne pas l’utiliser.
La vente de billet en ligne fonctionne bien, par contre la boutique ne fonctionne pas bien.
Lire aussi l’article au sujet du web de la cité sur http://www.journaldunet.com/0406/040608citesciences.shtml