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Résilience et auto-outillage des organisations

mercredi 17 novembre 2021

 

Résilience et auto-outillage des organisations

Erasme, un do Tank... outillé par lui-même (une longue histoire)

Depuis de nombreuses années, Erasme construit des méthodes de travail au service d’une pratique interne de l’expérimentation et du prototypage léger, de l’innovation par les usages et du décloisonnement des pratiques (sprints créatifs et remix, espace de Laboratoire participatif, dispositifs d’incubation).

Ce travail de diffusion d’une culture de l’innovation permet d’augmenter l’impact de l’action publique par un effet “miroir”. Il prend racine sur les méthodologies déployées à l’intérieur de l’administration, vers des solutions et services externes développées selon les mêmes valeurs et dynamiques (ouverture et partage de la valeur produite, amélioration continue et pérennité, responsabilité sociale et environnementale...) et contribue en même temps à nos apprentissages permanents ; en tant qu’acteurs publics au service d’un territoire ouvert et capable d’adaptation.

De tels dispositifs, proposés à tous s’appuient en réalité sur la construction d’outils et de pratiques internes/propres à Erasme et nourris d’une veille continue. Un travail d’artisanat consistant bien souvent à s’inspirer et déconstruire les tendances externes ou émergentes ; pour concevoir nos propres briques et environnements de travail sur mesure.

Pour ce faire plusieurs leviers d’action, devenus des chantiers complémentaires, ont été mobilisés depuis 20 ans :

  • les approches méthodologiques et créatives conduites par le design ;
  • les pratiques et les cultures de collaboration (bases et partage de la connaissances, travail temps réel/agile, processus de choix et d’alignement…) ;
  • la capacité de production et fabrication servie par une boite à outil de prototypage/fabrication, à la fois numérique et physique (outils numériques / interactifs, design et usage d’espaces, modèles d’organisation/gouvernance…) ;
  • enfin plus récemment, le développement personnel, servi par les pratiques d’apprentissage d’équipe, de bien-être et d’efficience.

D’abord conçus et testés pour notre fonctionnement d’équipe, ces dispositifs sont mis au service de nos activités (animation et gestion de l’UrbanLab, formats de sprints/Remix, incubation, programmes d’innovation territoriaux …), pour être ensuite et autant que possible modélisés et transmis à nos collaborateurs, aux publics internes et externes. Ce fut notamment le cas de l’internalisation de postes de designers, des approches opensource ou de l’usage d’outils collaboratifs agiles intégrés à Erasme à partir de 2008 et diffusés maintenant largement à l’échelle de la collectivité.

Cet outillage méthodologique et technique s’appuie nécessairement sur :

  • l’agilité et la curiosité d’une équipe pluridisciplinaire et polyvalente ;
  • des temps dédiés à la veille et au test de nouvelles opportunités conduites par l’expérimentation ;
  • un workflow rigoureux de gestion de l’entrant, d’évaluation/validation et de documentation recouvrant un nécessaire équilibre entre stabilité et renouvellement des pratiques.

Cet article inaugure une série de retours d’expériences et réflexions sur l’auto-outillage professionnel, et débutera par la capacité de réalisation ouverte depuis quelques années par le now/low-code au service de l’innovation.

Prototyper et produire, une question d’environnement et de culture à la portée de tous

La capacité à “faire” de toute organisation est conditionnée à des préalables d’environnement non nécessairement opérationnels, mais favorables, tels que :
 un ou des espaces dédiés/sanctuarisés à la production : Dédiées au projets, pas aux réunions, ces espaces mettent en avant les "idées physiques" plus faciles à manipuler et à retenir, ainsi que le discours partagé
 un outillage physique et/ou numérique ad-hoc : réseau Internet ouvert, machines non bridées, mobilier mobile et modulaire, paillasse/établi, outils de fabrication le cas échéant
 une base arrière de ressources et matériel permettant la mise en œuvre et les itérations de production : impression/dessin, fabrication/cartonnage, projection/audiovisuel, assemblage/structure, calage, dispositifs numériques actifs avec leurs frameworks... mais aussi une bibliothèque de savoirs, de charte et d’histoire du lieu (livres, kits pratiques, wikis...)

La techshop d’Erasme

Une telle mise en œuvre se structurera nécessairement autour d’étapes progressives (sprints/ateliers, formations, création de kits, démarche de Lab...) d’abord propulsée par un groupe pilote puis appuyée sur une culture pratique et des moyens répartis, faisant passer chacun d’une motivation extrinsèque à l’intérêt et l’envie d’utiliser cet environnement ; pour la résolution de problèmes et éventuellement la valorisation (à son tour) du travail de mentorat et de créativité interne.

C’est par exemple le cas du design des espaces de travail qui, pensé comme un chantier collectif permet de connecter les activités d’une équipe aux usages et besoins fonctionnels d’un espace souvent normé jusqu’à lui impulser l’esprit et les valeurs d’un groupe (décloisonnement, murs inscriptibles, infrastructures techniques prêts à l’emploi, mobilier de travail sur mesure..).
A Erasme le mobilier a, en l’occurrence, été intégralement conçu en interne et produit avec notre fablab local, pour servir des activités de collaboration, rangement, développement, visio… en toute modularité ! Cette démarche de fabrication de nos pratiques de lieu, de mobilier et d’espace feront l’objet d’un article dédié.

Très logiquement les outils numériques, ont amplifié notre capacité d’outillage, historiquement appuyée sur des dispositifs légers (et libres) au service de concrétisations frugales :

  • Les plateformes d’usage fortement interopérables ou les CMS-headless utilisés comme stockage de données pur tels que SPIP, Umap… sont devenus autant d’outils agiles et d’investissement rapide souvent détournés de leur usage nominal. En terme d’auto-outillage, ils ont par exemple permis la construction de nos Sites Internet par des ressources essentiellement internes puis des Classes Culturelles Numériques et leur amélioration continue pendant 10 ans.
  • Les dispositifs embarqués avec capteurs appuyés sur les environnements plug and play (Rasbian Raspberry4+Python) ou haut niveau (micro-bit + scratch), peu consommateurs d’énergie, multipliables à moindre coût et connectés au monde réel. Ils ont notamment permis la mise en place l’allumage et le monitoring des dispositifs actifs de l’UrbanLab, ainsi que la simplification de la vie quotidienne du lieu ! Ils ont aussi été investis dans la plupart des proptypages en support du design interactif du Lab et la réalisation de projets créatifs et pédagogiques comme https://code.laclasse.com mobilisant la dimension no-code à des collégiens au service d’usages thématiques
  • l’utilisation croissante des plateformes de partage de code, jusqu’à la récente dockerisation/rancherisation des environnements. Outre la simplification des ré-emploi de briques externes, cette démarche facilite en interne le transfert de projets entre services ou partenaires du produit depuis le stade d’expérimentation à son industrialisation et maintenance. Cette mise en visibilité des productions environnées et "testables" est aussi une manière de mette en avant les productions et l’opportunité de construction de projets partenariaux de type DatAgora avec l’université de Lyon.
  • l’appui sur des normes ouvertes facilitant la segmentation en applications unitaires, la documentation et l’interopérabilité entre les dispositifs (REST/HTTP, OSC, géoserveurs…) participent enfin des bonnes pratiques numériques internes servant le cadre de confiance de futurs partenariats !

Certains outils d’automatisation dont le récent et très prometteur n8n ont accéléré cette possibilité de “mashup”, néanmoins la séparation entre les expériences de conception, de prototypage et d’usage, représentent toujours un clivage important entre les équipes de travail et les contraintes d’une donnée et d’une algorithmie “cloisonnés” peu visible par les concepteurs ou les usagers, représentant in fine un frein à l’auto-outillage dans le domaine numérique.

C’est l’une des réponses apportées par les Data-Wikis, dont notre retour d’expérience est partagé ici.

Documents :

par Patrick Vincent